
in « Changer les voix en éducation: décolonisation et pensées critiques de la race (II) – Éducation, études critiques et colonialité », Revue LE TÉLÉMAQUE, Philosophie, Éducation, Société, Paris : Presses universitaires de Caen, n° 65, juillet 2024, p. 95-114
https://www.puc-ed.fr/book/?gcoi=28777100588070
La colonialité numérique se traduit par une reconfiguration des dominations (classe, race, sexe) alimentée par la société de l’information. Avec Instagram, SnapChat, WhatsApp, etc., les utilisateurices doivent faire face à des violences épistémiques, accompagnées d’un discours politique dominant qui tend à les individualiser. Parce que, en concertation avec les États, les entreprises qui créent ces applications nient l’historicisation, la contextualisation et le genre des savoirs des utilisateurices, leurs apprentissage et création de pensée en sont affectés. Paradoxalement, des usages transgressifs des outils numériques sont mis en place par des individu·es ou des organisations ; ils passent par la libération de savoirs non savants, rendus visibles par des « passeuses et passeurs de savoirs » à l’affût d’une pédagogie critique qui transforme radicalement les normes sociales.
Extrait de la présentation du numéro de la revue par Olga Kochie Akou et Jean-François Dupeyron
La philosophie de l’éducation de langue française, en dépit de son dynamisme et de sa riche variété, s’est pour l’instant assez peu inscrite et positionnée dans le vaste domaine des Critical Studies in Education. Il est vrai que ce domaine, qui recouvre plutôt des travaux anglophones et latino-américains, souffre de la rareté des traductions françaises de la plupart de ses textes essentiels. Des autrices et des auteurs aussi importants que les Nord-Américains bell hooks et Henry A. Giroux ou le Péruvien Aníbal Quijano, pour ne prendre que ces exemples, doivent être lus presque exclusivement dans leur langue, ce qui entrave leur réception et leur diffusion dans l’aire francophone. De même, l’ouvrage emblématique du Brésilien Paulo Freire (La pédagogie des opprimés) a dû attendre l’automne 2021 pour connaître enfin une réédition française, dotée d’une nouvelle traduction ; depuis sa publication au début des années 1970 chez Maspero, le texte était devenu quasiment introuvable et on doit remercier les éditions Agone de l’avoir réédité à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de l’auteur. Il s’ensuit que tout un pan des pédagogies critiques et des philosophies de l’éducation qui les accompagnent demeure dans un angle mort de la francophonie.
3 réflexions au sujet de « Colonialité numérique : mythe du rattrapage et transgression »