Le 5 août 2013, c’est-à-dire il y a quinze jours, sortait une étude commanditée par le Conseil national pour l’enfance et la maternité selon laquelle chaque année des milliers d’adolescentes égyptiennes, âgées de 11 à 18 ans, sont vendues par leurs parents à des hommes riches des pays du Golfe beaucoup plus âgés, sous prétexte de mariage. Ces noces fictives sont négociées entre 800 livres égyptiennes (86 euros) pour une journée, à 20 000 livres (2 085 euros) et 70 000 livres (7450 euros) pour un été. Rappelons simplement que dans ce pays, un quart de la population subsiste avec moins de deux dollars par jour… Ce marché permet aux riches touristes masculins des Emirats arabes unis, d’Arabie saoudite et du Koweït, d’avoir des relations sexuelles avec des mineures, alors que cela est strictement interdit par la religion musulmane. Quelle n’a pas été ma stupéfaction de constater à quel point cette information est passée entre les mailles du filet alors que l’Égypte est sous les feux des projecteurs. Ces filles sont des marchandises sexuelles et tout le monde s’en fout.
En revanche, une information s’est glissée concernant l’initiative de monter un Tribunal pénal international de la République démocratique du Congo, notamment pour demander réparation des viols, et plus généralement des violences sexuelles, comme armes de guerre. Le lien temporel entre viols et guerre fait son chemin. Mais combien de temps faudra-t-il encore attendre pour qu’on ait la clairvoyance de faire le lien structurel entre la situation de violence ordinaire à l’égard des femmes et le contexte global violent et ses menaces guerrières permanentes ? Là encore l’actualité égyptienne nous éclaire. En février 2013, les journalistes du monde entier nous alertaient à propos des agressions sexuelles dont étaient victimes les militantes venues manifester place Tahir contre le président Mohamed Morsi. Début juillet, de nombreuses organisations humanitaires signalaient des cas de viols le jour de l’annonce de la destitution du président, « sous les yeux de centaines de témoins, et auxquelles ont parfois pris part des dizaines d’hommes ». Ces grandes manifestations de désaveu n’analysaient pas pour autant la qualité des auteurs des agressions ni vraiment le contexte de leurs expressions.
Aujourd’hui, à l’heure où le pays semble glisser vers la guerre civile, où les morts se comptent par dizaines chaque jour, la mention de ces violences a disparu. N’y aurait-il plus de viols, d’agressions sexuelles ? Certainement pas. Alors pourquoi ? Faudra-t-il attendre encore dix ans pour qu’une enquête révèle que pendant les événements que les Égyptiens sont en train de vivre, des centaines, voire des milliers de femmes, se sont faites humilier, terrasser, embrocher, tringler, à coup de bâtons, de pioches, de queues, par dix, vingt, trente hommes, une armée ? Faudra-t-il espérer l’œil attentif d’une historienne égarée pour lire que cette actualité qui déchire pro et anti-islamistes est le résultat d’un système violent, basé sur des rapports de domination construits et solides ? Décidément, le système de domination entre les genres assoie tous les autres, y compris celui entre les races et les classes. Les pro-Morsi et les anti-Morsi le démontrent chaque jour. Comme les commentateurs de leurs agissements. Malheureusement.
Joelle Palmieri – 20 août 2013
Bien lu Nous sommes en vacances Au paradis mais nous ne sommes Ni sourdes ni aveugles…
J aime tes articles 😉 Bises Isa audrey et la petite Agathe
Envoyé de mon iPhone
Merci! C’est toujours très encourageant et flatteur d’avoir des commentaires sur ses écrits et cela me fait énormément plaisir! je ne doute pas une seconde que vous ne soyez pas sourdes et aveugles…
à très bientôt
bises
joelle